Le soleil brille de mille feux sur la Bretagne en ce jeudi matin. La journée s’annonce belle, douce et ensoleillée. Un doux parfum printanier s’installe en ville, en campagne et dans nos esprits. Mais un autre parfum semble prendre le dessus avec une aisance certaine, celui des grands soirs, au coucher du soleil, quand le ciel décide sans prévenir de changer littéralement de couleur, passant du bleu chaleureux au tiède enivrant. La coupe d’Europe. A journée exceptionnelle, compétition exceptionnelle. Ce jeudi 14 février, date de nos chers Valentin et Valentine, les projecteurs sont braqués sur de valeureux rouges et noirs, et les chandelles restent, malgré elles, au placard. Nos dames impuissantes face à cette vague passionnelle. Les abords du stade fourmillent d’optimisme et de joie. Affluence des grands, très grands matchs. Le Roazhon Park a sorti son plus beau costume. Il semble apprêté, impatient, accueillant et prêt à rugir.Une jolie couleur verte vient se joindre à l’entrée, intriguée et sensible au charme de l’antre bretonne, aux atouts irrésistibles. Un parcage visiteurs qui se rempli d’âmes espagnoles et de chaleur du sud ibérique. Côté Mordelles, le RCK donne rendez-vous à ses partisans pour 18 heures. L’attente fut longue, trop longue pour bon nombre d’entre-eux. Les locaux décident d’être présents dès le début de l’échauffement afin d’encourager son équipe. Et pas n’importe laquelle, voyons, celle qui va disputer dans quelques minutes le premier match de phase finale de coupe d’Europe du club fondé en 1901. Une ville, une région, un pays représenté, face aux redoutables et talentueux beticos de Séville. Claro que. Ambiance des grands soirs, tifo, chants, encouragements infaillibles repris par tout un stade, dévoué pour l’occasion, et pour le plus grand plaisir des joueurs sur la fraîche pelouse…
El partido
Cette rencontre, si spéciale, démarre sur les chapeaux de roues, avec une équipe rennaise qui décide d’enflammer le match d’entrée de jeu. A peine deux minutes de jouées quand Hatem Ben Arfa choisi d’entrer dans la danse, avec beaucoup d’aisance, pour servir un Mehdi Zeffane inspiré et décisif, pour l’unique joueur formé au club aligné d’entrée dans cette partie, le valeureux Adrien Hunou. Le natif d’Evry est et restera, à jamais, le premier buteur du Stade Rennais en phase finale de coupe d’Europe. Le stade est en fusion, en liesse, sans comprendre réellement ce qu’il se passe et n’en demandait pas tant, à la bande de Julien Stéphan. Moins de dix minutes plus tard, les rouges et noirs aggravent le score, pour le plus grand bonheur des quelques âmes du Roazhon Park sur un but contre son camp du pauvre Javi Garcia. Los aficionados du Betis sont déboussolés, muets et sans réaction aucune, au contraire du public rennais, aux anges, dans un rugissement indescriptible et une ferveur que seule la coupe d’Europe semble en mesure de provoquer. Une liesse populaire magique dans les travées de la tribune Mordelles, avec un Roazhon Celtic Kop déchaîné et littéralement dans le cosmos. Sans trop savoir pourquoi, ni comment, le Stade Rennais mène 2-0 face à l’ogre sevillan, dans un match où tout prête à sourire. Alors on prend. Il faut attendre quelques minutes avant de voir nos amis espagnols se réveiller en tribune visiteurs, lorsque Giovanni Lo Celso, prêté par le Paris Saint Germain, réduit la marque en glissant et trompant un Tomas Koubek malheureux sur ce coup-là. Mais la pression et la passion ne faiblissent pas côté RCK, et sera récompensée par un pénalty (généreux) obtenu par l’intenable Ismaïla Sarr et transformé avec brio par Hatem Ben Arfa, face à un Joel Robles pris à contre-pied, devant un kop rennais surchauffé et transporté. 3-1, mi-temps.
Crédit photo : Le Télégramme
Cette première période n’aurait sans doute jamais dû s’arrêter. La reprise est compliquée pour les rouges et noirs, car en face, le Betis semble vouloir indiquer une certaine supériorité technique à ses adversaires du soir. Même en terre hostile, les hommes du romantique Quique Sétien s’empressent de câliner ce ballon qui lui est cher. Maîtriser les débats, c’est avoir le cuir dans les pieds, et ne pas laisser de miettes aux éventuels courtisans. Les coéquipiers de captain’ André reculent, subissent et font le dos rond, jusqu’à cette réduction du score de Sidnei sur coup de pied arrêté, laissant place à la peur et aux craintes d’une remontée sevillane. Le coup de patte de la légende Joaquin fait mouche, bien aidé par le manque d’inspiration du gardien tchèque adverse. La tension se ressent, l’ivresse laisse place, petit à petit, au douloureux mélange de fierté et de frustration. Les visages sont crispés, grimaçants, avec un soupçon d’espoir au coin de l’œil. Mais Diego Lainez. El mexicano, dix-huit ans, entré en cours de match à la place d’un Junior Firpo de nouveau blessé, se permet de faire danser le flamenco à la défense bretonne. La lumière vient donc naturellement de celui qui brille. Le Betis arrache, dans les ultimes minutes de cette affiche, l’égalisation porteuse d’espoir. Le parcage visiteurs exulte, se déchaîne, pendant que tout un stade émerveillé se sent presque trahi, poignardé et abandonné. Les visages tombent, les uns après les autres dans les mains. Les cheveux sont arrachés, pour ceux qui en ont. Les cris du désespoir sont perceptibles dans ce brouhaha incompréhensible. Il faut que la frustration redescende, que les gens puissent prendre conscience de ce qu’ils viennent de vivre, malgré le scénario cruel de cette fin de rencontre…
Crédit photo : Ouest-France
Article écrit par @Piazzooo