Cela fait des années que l’Ajax m’enchante. Cela fait des années qu’Amsterdam m’envoûte. C’est donc naturellement que j’ai décidé de monter voir la Johan Cruyff Arena le 13 avril dernier. Les Ajacides recevaient l’Excelsior Rotterdam, club satellite du Feyenoord comptabilisant trois titres de champion de D2. Les têtes blondes amstellodamoises font trembler leurs hôtes et font rêver l’Europe depuis le début de la saison. Il était ainsi impossible de ne pas assister à un match avant la fin de la saison, avant que l’équipe ne se délite et que certains de ses joueurs ne cèdent au si joli chant des sirènes des cadors du Vieux continent. Le problème étant que je fus loin d’être le seul à penser la même chose.
Derrière mon écran d’ordinateur, je tentai d’acheter mon billet pour cette partie du 13 avril. En vain. Toutes les paires d’yeux avisées ont vu en cette équipe quelque chose d’une beauté éphémère qu’il est nécessaire d’aller voir en vrai et tous les matches, jusqu’à la fin de la saison, se jouent à guichets fermés. L’Ajax Amsterdam de cette année est une exposition temporaire rassemblant des jeunes artistes au talent indéniable, et il convient de s’y déplacer pour aller mesurer l’intensité de ces œuvres d’art. Après deux ou trois tentatives infructueuses, je ne baissai pourtant pas les bras.
Il me fallait en être. Qu’à cela ne tienne, je décidai alors de réserver mon billet d’avion et de croire en ma bonne étoile pour trouver une place aux abords de l’ArenA. Pour accroître mes chances et ne pas rentrer bredouille, et pour éviter de regarder le match au bar du coin, je pris une petite pancarte avec moi, sur laquelle je demandais une place en échange de mon écharpe de Monaco, en bon supporter de l’ASM que je suis. Après quelques glorieux échecs, des regards amusés et des refus désolés, je trouvai ma place en un peu plus d’une heure. Je remercie d’ailleurs ce cher néerlandais prénommé Florian, lequel souhaitait me vendre sa place à prix coûtant mais qui changea son fusil d’épaule après une des négociations les plus faciles que j’ai eues à mener (moi qui suis loin d’être un as en la matière).
J’étais donc parfaitement installé au dernier anneau de ce stade moderne de plus de 54.000 places, à quelque pas de la tribune de presse.
La ville
Connaissant un peu Amsterdam et surtout son hypercentre, je décidai de m’éloigner et de me rendre à la Johan Cruyff Arena à pied. Le trajet affichait entre 1h45 et 2h de marche, parfait pour découvrir la ville sous des angles inédits. Après avoir longé l’Amstel et découvert l’Albert Cuypmarkt dans le quartier du Pijp, je pris la direction de l’Amstel Park avant d’avoir le vaisseau blanc en ligne de mire et de m’orienter au son de Bob Marley (Three littles birds) craché des enceintes de l’ArenA.
Le stade
L’enceinte renvoie l’image d’un grand club. D’une institution ayant marqué l’histoire du jeu au fer rouge. Et cette Histoire s’est dotée d’une majuscule depuis que son éternel numéro 14 est parti en ayant laissé son prénom et son nom à ce stade. Tout concourt à ce que le respect de la mémoire soit au centre de l’attention.
L’Ajax Amsterdam est un des plus grands, et pour qui fut trop éloigné de la planète football depuis des décennies pour ne pas avoir eu vent de ce fait, cette information vous saute à la figure. Les spectateurs, les supporters affluent très tôt comme on se rend sur un lieu de culte. A l’intérieur, c’est le jeu qui est mis en exergue. Du dernier anneau, le pré vert se dessine comme si l’on se trouvait aux premiers rangs.
L’ambiance
Le toit couvrant une grande partie du stade, les décibels montent très vite. L’Ajax jouant le titre à distance avec le PSV Eindhoven, la F-Side donne de la voix et est soutenue par les quatre tribunes. Le bémol : il est facile de remarquer que dans ce stade, les buts sont légion. Rappelons que cette saison, avant ce match, les Ajacides avaient fait trembler les filets à 100 reprises, dont 56 fois à domicile. Les privilégiés assis dans l’ArenA ont à peine le temps de célébrer le buteur et son équipe que les joueurs se sont déjà replacés dans leur propre camp, attendant impatiemment d’inscrire un énième but supplémentaire.
Le public est toutefois connaisseur et sait s’extasier sur la passe trouvée dans le bon intervalle, l’excellent replacement défensif, le geste parfait.
Globalement, j’ai trouvé l’ambiance très bonne, sans qu’elle soit pour autant mémorable. Le jeu constitue le premier spectacle et passe avant tout.
Le match
Après être revenu au contact du PSV Eindhoven, l’Ajax se bat pour tenter de soulever son 34e championnat des Pays-Bas, un titre qui lui échappe depuis 2014 après quatre années passées à imiter Raymond Poulidor (#TeamFinirDeuxième).
La légende Klaas-Jan Huntelaar est aligné en pointe avec Tadic, et la paire follement talentueuse Neres – Ziyech se charge de donner des vertiges aux latéraux adverses. Au milieu, de Jong et van de Beek jouent les récupérateurs – créateurs, chacun dans son style, et quel style…
Le match commence et vu du stade, les déplacements des uns par rapport aux autres sont magnifiques à observer. Dans la ville de Heineken, la pression est mise d’entrée de jeu. Et l’Excelsior craque vite devant le sang-froid de Huntelaar (1-0, 10e) grâce à un amour de passe de van de Beek. L’attaquant de 35 ans, qui désormais commence ses rencontres davantage sur le banc que sur le terrain a une faim de loup et le fait savoir. Il est à l’origine du deuxième but inscrit par Tadic (2-0, 37e) et réalise son doublé trois minutes plus tard (3-0, 40e) sur un service de Ziyech. Entre temps, mon coeur d’amoureux du ballon rond se serre lorsque je vois de Jong sortir du terrain sur blessure à la 30e minute. Mais je trouve rapidement le moyen de me consoler en me disant que lorsque l’on est devant une mine d’or, il n’y a pas qu’une seule pépite. L’Excelsior, mal classé en Eredivisie, réduit la marque avant la pause (3-1, 42e). A l’heure de jeu, l’Ajax retrouve son rythme d’affamé et inscrit son quatrième but de la soirée sur un penalty parfaitement tiré par Tadic (4-1, 60e). Doublé du Serbe, doublé du Néerlandais. Mais ce dernier n’a pas envie de s’arrêter en si bon chemin et souhaite repartir avec le ballon du match. Servi par son compère d’attaque, Klaas-Jan fait parler sa précision du buteur et marque son troisième but (5-1, 65e). Entré à la 73e, le prodige prochainement arraché par toute l’Europe Kasper Dolberg se charge d’aggraver la marque grâce à un délice signé Ziyech – encore lui (6-1, 75e), sur un enchaînement magistral. Le dernier but inscrit par l’Excelsior en fin de rencontre ne viendra que très légèrement ternir ce récital. Dans ce mot, il y a à la fois l’idée d’une récitation et d’une déclamation. Déclamation d’abord, car les hommes d’Erik ten Hag profitent de chaque occasion pour déclarer leur flamme au jeu, saisissant la balle au bond pour ouvrir leur coeur et faire une ode à ce football tant regardé, tant désiré. Le football le leur rend bien et l’amour est réciproque. Récitation également parce qu’ils ont quelque chose en eux de Maximilien, ce surdoué premier de la classe en CM1 qui récitait ses poésies devant la maîtresse avec l’intonation parfaite et sans accroche aucune. Tout est fluide, tout est absolument naturel. Maximilien était énervant ? Pas ces petits génies du ballon rond que les Dieux du football ont bien voulu faire jouer ensemble. Alors profitons-en tant qu’il est encore temps.
L’aventure groundhopping
La soirée se termina dans le centre d’Amsterdam à déambuler dans les rues d’avril encore fraîches. Ne me restait plus qu’à prendre un des derniers trains possibles pour l’aéroport Schipol pour me trouver une petite place où dormir, un petit coin où je pourrais digérer les actions observées quelques heures auparavant.
[…] au détour d’un « coin » de rue. Du point de vue architecture, il me fait penser à l’Amsterdam Arena avec la forme des gradins du 3e niveau qui se dessine et ces espèces d’arche sur le […]