Après être allés assister à Hambourg-Nuremberg la veille, nous retournons sur Berlin le vendredi matin, encore une fois en Flixbus, toujours partenaire n°1 des voyageurs sans le sou, donc des groundhoppers. Depuis la ZOB de Berlin, nous montons dans un S-Bahn à Westkreuz, qui nous dépose à Hauptbahnof, la gare centrale, à proximité de laquelle se trouve notre auberge et où est située une boutique du Hertha. Dans cette construction sur cinq niveaux où les trains circulent soit tout en bas (grandes lignes), soit tout en haut (S-Bahn), et où les autres étages servent de galerie commerciale, nous tournons un peu en rond avant de trouver l’emplacement du fanshop, et demandons conseil à la vendeuse, puisque là aussi je désirais ramener des billets cartonnés pour ma collection plutôt que de payer le même prix pour un code-barres en PDF sur mon téléphone. Le risque de se retrouver le bec dans l’eau était quasi-nul, pour tout amateur de foot en villégiature à Berlin il est bien plus facile d’aller voir un match du Hertha à l’Olympiastadion (75,000 places) que de l’Union au stade An der Alten Försterei (22,000 places et première saison de son histoire dans l’élite allemande, donc à guichets fermés quasiment à chaque match). J’ai souvent entendu, et ai d’ailleurs pu le vérifier sur les affluences de Transfermarkt, que le stade olympique n’était jamais plein sauf pour le Bayern et le BVB.
La billetterie
Nous prenons donc nos places autour de 14h, pour un match à 21h, sans aucun souci. La politique tarifaire avait l’air très compliquée sur la billetterie en ligne, avec des blocs qui prennent ou perdent quelques euros par rapport au siège mitoyen selon le degré de visibilité du terrain. La vendeuse me demande combien je suis prêt à mettre, je lui réponds pas plus de 25€, elle me propose alors deux possibilités : dans le virage Est des supporters locaux pour 23€, mais tout en haut et dans le coin, ou alors en bloc K pour 19€, dans le virage opposé et pas trop bas. Elle me maintient que la visibilité y est meilleure en bloc K, car de l’autre côté les places sont très hautes (pour avoir déjà assisté à un match au Stade de France dans les dernières rangées, je préfère éviter ça), et nous conseille donc le bloc K. Étonnés qu’elle nous conseille le moins cher, et souhaitant tout de même distinguer les joueurs sur le terrain, nous l’écoutons ; ce soir, nous le regretterons un peu.
La ville
Ayant réservé nos vols à une semaine d’intervalle, nous avons prévu de rester encore cinq journées complètes sur Berlin, donc nous consacrons le laps de temps entre notre réservation et la rencontre à nous installer dans notre auberge et à nous promener dans les environs. Finalement, puisque le temps nous le permet, nous nous rendons au Mémorial du Mur, d’où nous partirons ensuite directement au stade. Je ne pense pas avoir besoin de trop m’attarder sur les attributs touristiques de Berlin : que vous y restiez un jour, une semaine ou un mois, vous trouverez toujours à y voir et à y faire. Les deux seuls conseils que je peux vous donner au regard de ce court séjour, c’est de bien vous couvrir si vous y allez hors beaux jours, et surtout de vous préparer à voir beaucoup de musées et à prendre tout le temps les transports.
Le Hertha Berlin
Je me suis renseigné sur le Hertha avant d’aller le voir, principal club de la capitale, principal club de Berlin Ouest contrairement à l’Union et au Dynamo, fort de deux titres de champion décrochés… dans les années 1930. Bizarrement, il réveille en moi beaucoup moins de souvenirs d’enfance et de l’Équipe du Dimanche que le HSV. Les seuls joueurs « historiques » que je peux mobiliser dans ma mémoire sont le gardien hongrois Gabor Kiraly, et… Salomon Kalou. C’est pauvre. Encore une fois, je vous recommande un article du journal suisse Le Temps, qui cette fois traite des deux clubs de Berlin à l’occasion de leur premier derby en Bundesliga : Union-Hertha, le derby format berlinois.
Le stade
« Le Hertha revendique le fait d’être un club commercial, porté sur la modernité » : cette phrase m’a fait tiquer et m’a marqué (comment un club peut-il se revendiquer commercial ?), et je m’apprête à la vérifier.
Théâtre de la finale de la Coupe du Monde 2006, mais aussi des records du monde d’Usain Bolt ou des funestes JO de 1936, l’Olympiastadion a le mérite d’être bien desservi par les transports en commun, ce qui vaut mieux étant donné son statut : avec les S-Bahn S3 ou S9, ou le U-Bahn U2 (2,90€ le ticket quel que soit le moyen choisi, les transports sont très chers à Berlin), les possibilités sont nombreuses depuis le centre et le trajet n’est pas long. Nous y sommes une heure avant le match, nous nous faufilons entre les amateurs de bière sur le parvis, passons les portiques et les contrôles, et nous voici dans l’enceinte du stade. L’aspect de celui-ci est très singulier : tout en pierre, l’architecture extérieure fait penser (sans doute à dessein) aux constructions grecques ; et creusé en contrebas du niveau où nous sommes, il nous donne l’impression, chaque fois que nous voyons à travers les portes, de nous approcher d’une arène. Première surprise : bien que nous soyons passés par l’entrée principale, et que nous soyons à proximité de notre bloc puisqu’au niveau du G et du H, il nous faut faire tout le tour du stade pour rejoindre notre place ! Trajet qui nous prendra un bon quart d’heure sans exagérer, au milieu des buvettes et boutiques de souvenirs qui alternent et reviennent inlassablement tout au long du parcours… La première impression d’ensemble était bonne, la deuxième est gâchée.
Le match et l’atmosphère
Nous arrivons finalement à notre bloc, descendons à notre place, et constatons rapidement que l’atmosphère est spéciale. Au milieu des écharpes de Schalke, des Asiatiques et des instagrameuses, nous comprenons que nous sommes dans la partie du stade réservée aux touristes, ni plus ni moins. Un peu plus tard, je m’étonnerai même à être le seul parmi toutes les rangées avoisinantes à applaudir d’encouragement une belle action des joueurs du Hertha. De l’intérieur, le stade est beau et imposant mais le bleu de la large piste d’athlétisme et les panneaux de pub qui cachent la ligne nous rappellent que celui-ci n’a pas été conçu pour la pratique du football. Le niveau inférieur est plutôt bien rempli mais beaucoup de sièges vides sautent aux yeux plus haut, nous sommes 47,863 spectateurs (sur 75,000 places pour rappel, sachant que le week-end suivant contre Mayence ils ne seront que 35,000…). L’avant-match sent le foot aseptisé, impersonnel, et même le petit show avec grosses lettres sur la pelouse et hymne du club dégage quelque chose d’assez peu authentique. Seules exceptions, l’extinction des lumières pour l’annonce de la compo, plutôt sympa car inattendue, et la sciarpata suivie par tout le stade juste avant le coup d’envoi, qui ne rendait pas en photo.
C’est la proximité des supporters de Schalke qui égaiera notre rencontre tout du long. Les fans du Hertha ont l’air de chanter, là-bas de l’autre côté, mais nous sommes beaucoup trop loin pour nous en rendre compte, et il faut aussi le souligner, parce que les supporters de la Ruhr font beaucoup de bruit. Dès le coup d’envoi, tout le parcage, étendu de bas en haut, craque ses fumis, ce qui occasionne un épais brouillard et les remontrances du speaker. Les plus belles actions du match seront bel et bien en tribunes, car sur le terrain, nous sommes à l’opposé de ce football allemand rythmé et spectaculaire que nous attendions et dont nous avions vécu un premier aperçu la veille à Hambourg. Nous avons eu droit à un insipide 0-0, score qui n’arrive quasiment jamais en Allemagne, et qui nous a d’autant plus déçus que la même affiche le mardi suivant en Pokal, mais à Gelsenkirchen, a donné un 3-2 pour les Königsblauen. Pour les supporters nantais, Amine Harit est en jambes et monte en puissance au fil du match, et pour les Toulousains, Todibo rentre en fin de partie après avoir passé la mi-temps à s’échauffer. Dans les buts visiteurs, Nubel, le futur gardien du Bayern, passe une rencontre tranquille, que n’aura pas réussi à emballer Piatek pour ses premières minutes berlinoises, et ce malgré un très bon Ascacíbar derrière lui, l’Argentin avec qui Lucas Tousart devrait faire la paire la saison prochaine au milieu de terrain. J’ai été agréablement surpris par l’attaquant belge Benito Raman qui m’était inconnu, très remuant pour les joueurs de l’ancien technicien d’Huddersfield, David Wagner, et à une parade près de profiter d’une mauvaise passe en retrait du pourtant globalement serein Boyata. En tant que suiveur de la L1, aurais aimé voir Kalou et Rekik, mais ni l’un ni l’autre n’était sur la feuille de match. Quant à Jürgen Klinsmann, nous l’aurons aperçu de loin, pour son avant-dernier match de Bundesliga à la tête des Berlinois.
Pour rentrer, après avoir refait tout le tour du stade dans l’autre sens, nous sommes encore étonnés par ces trains qui n’arrivent pas à l’heure prévue, qui nous laissent poireauter sur le quai, qui restent bloqués plusieurs minutes à chaque gare, alors que la réputation germanique et le fait de se diriger vers le centre-ville nous faisaient espérer une organisation mieux huilée que celle d’un RER D aux heures de pointe.
L’Eisbären Berlin, la branche hockey du Dynamo
Enchantés la veille, le bilan est cette fois mitigé, et nous espérons alors que la dernière rencontre sportive du samedi ou du dimanche nous laissera sur une meilleure impression. Sauf que… le Dynamo est à l’extérieur, le Tennis Borussia ne joue pas, le RB Leipzig reçoit à guichets fermés, Rostock et Dresde sont à l’extérieur. Nous nous rabattons alors sur une autre discipline, et d’ici à notre vol retour le mercredi soir, nous avons le choix entre handball, volley ou hockey sur glace. Connaissant l’amour des Allemands pour le hockey, et l’amour du hockey pour le show, nous choisissons d’aller voir jouer les Eisbären le dimanche après-midi. Des Eisbären qui ne sont autres que la branche hockey du Dynamo de Berlin Est, grand club omnisports qui comptait aussi sa section football, devenue depuis le BFC Dynamo. Hébergés dans la flambant neuve Mercedes-Benz Arena, à proximité immédiate de quelques coins touristiques qui valent le coup d’œil (East Side Gallery, pont d’Oberaumbrücke), nous sommes plus gâtés que l’avant-veille et avons droit à un très beau spectacle, autant dans les animations avec des tonneaux en feu sur la patinoire et d’inattendus feux d’artifice en intérieur, que sur la glace où le score final est de 6-2. La place nous aura coûté 15€, achetée deux heures avant le coup d’envoi directement aux guichets de l’Arena, et aura probablement été un meilleur investissement que la rencontre du Hertha.
L’expérience groundhopping
Concernant les clubs étrangers que je ne supporte pas déjà en amont, je m’attache toujours d’une façon ou d’une autre à ceux que je vais voir, de l’Olimpija Ljubljana à Hibernian en passant par le Dinamo Zagreb ou le Genoa. Le HSV rentre facilement dans cette catégorie. Le Hertha ? Bof. J’ai besoin de ressentir des émotions sincères, envers les supporters autour, envers ce qui se passe sur le terrain, envers le rituel d’avant, pendant et après match. Au Hertha, tout ceci m’a semblé très artificiel. Encore une fois, sans doute n’étais-je pas du bon côté du stade, le manque de spectacle sur le terrain n’ayant pas non plus joué en leur faveur, et pour vous faire un aperçu plus honnête, je ne peux donc que vous recommander à tous de choisir l’autre virage : il vaut probablement mieux une bonne atmosphère avec une piètre vue que l’inverse. Néanmoins, mon impression ne me surprend pas plus que ça car elle est finalement en accord avec différents témoignages que j’avais lus ou entendus en amont, tant sur le désamour global des Berlinois pour le Hertha que sur le manque d’ambiance à l’Olympiastadion. En fin de compte, je suis resté sur la même impression qu’après avoir vu jouer West Ham au London Stadium au printemps 2017. Une malédiction des stades olympiques ? Peut-être, avec le manque de ce petit supplément d’âme, de cette sincérité qui se ressent rapidement pour un amateur de football authentique. Mais pour un club qui se veut « commercial, porté sur la modernité », alors l’objectif semble atteint.
En bref, ça ne tient pas la comparaison avec le match du HSV la veille. N’allez pas à Berlin exprès pour le Hertha, n’en faites pas la raison principale de votre séjour : allez-y pour le tourisme et profitez-en pour faire tour à l’Olympiastadion, ou alors allez-y pour l’Union.